Villarzel-l’Evêque. C’est ainsi que les historiens surnomment ce petit village perché sur une falaise qui domine Marnand. Mais pourquoi ce nom en pays protestant? C’est ce que nous allons découvrir au fil de cette balade très historique qui débute à Marnand.
Jusqu’à la construction de la ligne de chemin de fer de la Broye, Marnand constituait l’un des plus importants relais routiers de Suisse. Au croisement de l’axe Berne-Lausanne avec la route de Granges à Villarzel, il y avait tout un complexe servant à loger des voyageurs et des palefreniers, ainsi que trois restaurants et un jeu de quilles. Dans les écuries se trouvaient en permanence 80 à 120 chevaux qui assuraient le service de la douzaine de diligences qui se croisaient là quotidiennement. Si vous venez en voiture, vous parquerez sans doute votre véhicule entre la messagerie et l’ancienne «hostellerie» de 1ère classe. Si vous venez en train, la gare la plus proche est bien sûr celle de Granges-près-Marnand.
Une fois au cœur de Marnand, repérez les panneaux jaunes du tourisme pédestre. Il faut partir sur la gauche et suivre le chemin qui grimpe dans la forêt. Ne quittez jamais le chemin balisé, qui vous conduira facilement vers Villarzel. Après la clairière du Moulin aux Anes, dans la montée, n’oubliez pas de bifurquer à droite, ce qui vous évitera d’aller jusqu’à Trey. C’est le moment de vous laisser aller à la flânerie. Au gré des saisons, la balade est un régal pour les amateurs de botanique.
Depuis Marnand, comptez une petite heure jusqu’à Villarzel. Le premier bâtiment qui s’offre à votre vue est la tour des pauvres. En vous retournant, à votre gauche, votre regard sera immédiatement happé par l’église et son clocher rustique. N’hésitez pas à pousser la porte.
Hors du temps et insolite, l’église de Villarzel ne laisse pas indifférent. Sa forme – un clocher rustique en arcade – mais également son emplacement – elle est située tout au bout du village, à proximité de la forêt – sont une énigme pour celles et ceux qui ne connaissent pas l’histoire de la bourgade. L’explication est simple: à la fin du Moyen Age, les habitants de Villarzel abandonnèrent le château et son enceinte pour s’installer plus haut, vers le sud. Dédiée à Saint Georges, l’église est déjà mentionnée en 1228. Sa cloche est l’une des plus anciennes du canton de Vaud. Preuve qu’elle date d’avant le régime bernois, elle porte les noms latins des quatre évangélistes !
Nous sommes à «La Ville». Au Moyen Age, Villarzel était un bourg fortifié, pourvu d’une enceinte. Avant la domination bernoise, en 1536, ce village était le centre des possessions de l’évêque de Lausanne dans la région de Payerne, d’où l’épithète que les historiens continuent à lui attribuer : Villarzel-l’Evêque. La bourgade abritait alors un château fortifié construit en 1212 par l’évêque Berthold et fortifié en 1231 par l’évêque Boniface, qui y séjournait volontiers. Bâti sur un éperon de terrain aux pentes abruptes et dominant un profond et sauvage ravin, le château de Villarzel et son bourg ont été abandonnés, puis démolis, les habitants préférant se rapprocher des terres cultivées. Seules subsistent l’église et la tour carrée.
Elle est bien seule, la tour de Villarzel. Au Moyen Age, elle marquait l’entrée du bourg primitif, alors fortifié. Elle fut construite, il y a près de huit siècles, par un évêque qui voulait protéger ses possessions des seigneurs de la Suisse alémanique. Pris et brûlé sous l’épiscopat de Guillaume de Champvent (1231-1301), Villarzel perdit de son importance. Les pierres du château et de l’enceinte servirent à construire les maisons du village. La tour et l’église furent épargnées. Sous les Bernois, l’ancienne porte servit de prison et de grenier. En 1802, la commune racheta cette tour carrée pour 155 francs et y logea les pauvres du village. Sa terrasse est aujourd’hui encore utilisée comme cimetière. Classée monument historique, la tour figure dans les armoiries communales. En piteux état, les escaliers intérieurs ne sont malheureusement plus accessibles au public.
On revient en arrière et on traverse le village, qui est constitué d’une cinquantaine de maisons distribuées sur les deux côtés d’une longue rue. En 2006, la commune de Villarzel (382 habitants) a fusionné avec ses deux voisines, Sédeilles et Rossens. Un acte avant-gardiste en terres vaudoises, qui rappelle que Villarzel a toujours été ouverte au progrès. Ainsi la paroisse fut la première du canton où les femmes firent usage de leur droit de vote, en 1910, pour la nomination d’un pasteur.
La traversée du village, qui se développa au XVIIe siècle au détriment du bourg fortifié, nous amène au point culminant de cette balade, soit à 671 mètres d’altitude. En passant devant le collège, à votre gauche, vous pourrez admirer, devant le collège de Villarzel, la pierre du Moulin-aux-Anes, seul vestige encore visible de cet édifice. A droite, à la hauteur du restaurant de l’Ours, est indiqué le chemin de Devin, qui nous ramènera à notre point de départ.
Durée de la randonnée : deux petites heures.
Distance : 4,1 km.
Dénivelé : 347 m.
Pour qui ? Possible en famille, montée difficile avec de petits enfants.
Orientation : carte nationale de la Suisse «swisstopo» au 1:25’000, no 1204, Romont.
Équipement : de bonnes chaussures, un chapeau, à boire et un petit encas.
Tiré du site www.grandangle.ch – photos CCr